DR SAMI BEKKALI / CHIRURGIEN UROLOGUE RABAT / samibekk@gmail.com / tel 0668111370
COLIQUE NEPHRETIQUE
A - Haut appareil urinaire
1 - Crise de colique néphrétique
a - Généralités
Les calculs des voies urinaires sont responsables de 80 % des coliques néphrétiques (CN) de l'adulte. Calcul et colique néphrétique ne sont donc pas synonymes : le calcul n'est qu'une des causes de colique néphrétique.
b - Physiopathologie2
La CN est un syndrome douloureux aigu lombo-abdominal résultant de la mise en tension brutale de la voie excrétrice du haut appareil urinaire en amont d'une obstruction, quelle qu'en soit la cause.
L'augmentation de pression dans les voies excrétrices est liée à deux facteurs principaux :
- l'oedème généré au contact du calcul par effet irritatif qui va à la fois favoriser la rétention d'urines sus-jacentes et bloquer davantage la progression du calcul ;
- la stimulation de la synthèse intrarénale de prostaglandines E2 (PGE2) vasodilatatrices sous l'effet de l'hyperpression intracavitaire qui représente le mécanisme physiopathologique essentiel.
Cf. § VIII. Pour en savoir plus
[2] D'après Carpentier X et al., Physiopathologie de la colique néphrétique. Prog Urol 2008 ; 18-12 : 844–848.
c - CN simple
Certains facteurs favorisants ont été identifiés :
- notion de voyage récent et prolongé ;
- séjour en pays chaud, travail en ambiance surchauffée ;
- immobilisation prolongée ;
- insuffisance d’hydratation ;
- activité sportive ;
- modification de l’alimentation.
La crise typique de CN est décrite ainsi :
- début brutal ;
- douleur aiguë, sans position antalgique ;
- douleur lombaire unilatérale, irradiant de haut en bas et vers l'avant le long de l'uretère vers les organes génitaux externes ;
- évolution par crises paroxystiques ;
- agitation et anxiété ;
- signes fonctionnels urinaires : pollakiurie, brûlures mictionnelles, hématurie ;
- signes digestifs : nausées, vomissements, arrêt du transit (iléus), voire tableau pseudo-occlusif.
Examen clinique :
- interrogatoire : antécédents personnels et familiaux de lithiase urinaire, prise de médicaments lithogènes, recherche de facteurs favorisant la CN ;
- apyrexie ;
- abdomen souple, parfois météorisé ;
- fosse lombaire sensible à la palpation et à la percussion, parfois tendue (rein dilaté) ;
- touchers pelviens négatifs ;
- bandelette urinaire négative.
La CN est résolutive dans la majorité des cas sous traitement antalgique symptomatique bien conduit.
d - CN compliquée
La CN compliquée est rare (moins de 6 %) mais peut engager le pronostic vital à court terme du patient et impose de savoir reconnaître ses signes précocement.
Elle est caractérisée soit par le terrain (grossesse, insuffisance rénale chronique, rein transplanté, rein unique, uropathie connue…), soit par l'existence d'emblée ou secondairement de signes de gravité.
Elle nécessite un drainage chirurgical des urines en urgence.
Trois tableaux cliniques sont à connaître.
CN fébrile ou pyélonéphrite aiguë obstructive
Il s’agit d’une urgence médico-chirurgicale. Elle correspond à des urines infectées en amont d’un calcul obstructif des voies urinaires supérieures et infection du parenchyme rénal.
Les principaux signes cliniques sont :
- fièvre > 38 °C ;
- frissons ;
- marbrures cutanées, instabilité hémodynamique ;
- BU positive (cf. § VI. Examens complémentaires, critères de positivité).
Rapidement et en l’absence de traitement adapté, le tableau clinique peut évoluer vers des troubles de la conscience, une défaillance cardiaque et/ou respiratoire, des troubles de la coagulation (CIVD)…
Des prélèvements bactériologiques (ECBU et hémocultures) sont obligatoires devant toute suspicion de CN fébrile.
Des mesures de réanimation d’urgence sont également le plus souvent nécessaires.
CN anurique
Trois mécanismes sont à son origine :
- insuffisance rénale aiguë fonctionnelle d’origine septique ;
- calculs bilatéraux = situation rare, reflet d’une pathologie lithiasique très active (cystinurie, hyperparathyroïdie primaire, hyperuricémie-hyperuricurie importantes…) ;
- REIN UNIQUE : congénital, restant ou fonctionnel.
Elle se traduit par une insuffisance rénale aiguë avec élévation très importante de la créatinine et des troubles ioniques fréquents (hyperkaliémie). Ne pas oublier l’ECG !
CN hyperalgique
Elle correspond à une douleur de colique néphrétique non calmée par un traitement antalgique symptomatique bien conduit avec utilisation d’AINS IV et de morphiniques IV en titration.
Elle nécessite alors une hospitalisation avec réévaluation de la douleur. Si le rythme et l’importance des crises ne cèdent pas, un drainage des urines en urgence est nécessaire.
Parfois, la douleur cède brutalement. Cela correspond à la rupture de la voie excrétrice ou rupture de fornix (jonction de la voie excrétrice sur la paille rénale) (fig. 15.2). Dans ce cas, si l’obstacle persiste, elle peut entraîner un urinome périrénal important, nécessitant également un drainage de la voie excrétrice en urgence.
Fig. 15.2. TDM avec injection – CN gauche avec rupture de fornix.
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e - CN de forme trompeuse
CN avec signes digestifs prédominants
Le tableau clinique prédominant est celui de l’iléus réflexe avec météorisme abdominal et vomissements.
Une erreur ou un retard diagnostique sont donc fréquents.
CN non lithiasique
Elle représente 20 % des coliques néphrétiques aiguës. Les douleurs sont dues à la mise en tension des voies excrétrices par un obstacle autre qu’un calcul (par atteinte de la paroi urétérale : tumeur ou sténose ou par compression extrinsèque de l’uretère : tumeur du petit bassin, ADP).
Syndrome de jonction pyélo-urétérale
Il est responsable de véritables douleurs de colique néphrétique. Il correspond à une malformation d'un segment de l'uretère à la jonction entre le bassinet et l'uretère proximal. Cette malformation peut entraîner un obstacle transitoire d'abord, permanent ensuite.
L'uro-TDM permet de mettre en évidence une dilatation des cavités pyélocalicielles avec un uretère fin.
Le diagnostic est confirmé par une scintigraphie rénale au MAG 3 avec test au furosémide qui révèle l'obstacle.
Le traitement est chirurgical avec la réalisation d'une pyéloplastie.
f. Diagnostics différentiels
L'interrogatoire et l'examen physique sont essentiels pour l'orientation diagnostique.
Le scanner sans injection permet le plus souvent de rectifier le diagnostic.
- Pathologies digestives :
- colique hépatique ;
- cholécystite aiguë ;
- pancréatite aiguë ;
- diverticulite ;
- appendicite aiguë ;
- hernie inguinale étranglée.
- Pathologies gynécologiques :
- grossesse extra-utérine ;
- torsion de kyste ovarien ou d'annexe.
- Pathologies médicales :
- pneumopathie ;
- arthrose lombaire.
- Pathologies vasculaires :
- fissuration d'anévrisme de l'aorte abdominale ;
- infarctus mésentérique.
Les deux cas suivants sont des cas particuliers touchant le rein.
Infarctus rénal segmentaire ou total
Une fébricule et une hématurie minime complètent le tableau de CN atypique.
Ce diagnostic doit être évoqué dans un contexte emboligène ou de déséquilibre brutal d'un traitement anticoagulant.
Le scanner sans injection peut être normal mais sur les coupes injectées, l'absence de perfusion du rein caractérisée par lecortex corticis est visible (fin liseré à la périphérie de la corticale du rein irriguée via la capsule).
Le traitement repose sur la fibrinolyse.
Nécrose papillaire
Principalement chez le patient diabétique ou le drépanocytaire, elle est peu fréquente mais souvent décrite.
2 - Hématurie
Elle est le plus souvent microscopique découverte à la BU mais peut être macroscopique.
Elle résulte de l’irritation de l’urothélium par le calcul.
3 - Infections urinaires
L’association infection urinaire-lithiase est fréquente. Il est cependant difficile de déterminer si le calcul s’est infecté secondairement ou si l’infection a précédé le calcul et a été responsable de sa formation.
Plusieurs situations sont possibles :
- bactériurie asymptomatique ;
- cystites récidivantes ;
- pyélonéphrites récidivantes.
4 - Insuffisance rénale
Les reins peuvent être détruits par des calculs asymptomatiques bilatéraux. Il s’agit le plus souvent de calculs coralliformes.
5 - Asymptomatique
Un calcul asymptomatique peut être découvert fortuitement sur un ASP, une échographie ou un scanner réalisés pour d’autres raisons.
6 - Cas particulier de la grossesse
La grossesse s'accompagne de modifications physiologiques des voies urinaires.
À partir du 2e trimestre apparaît une hypotonie des cavités pyélocalicielles, surtout à droite, par modifications hormonales et compression extrinsèque de l'utérus, le plus souvent en dextrorotation.
On observe de plus une hypercalciurie physiologique.
La glycosurie physiologique de la grossesse favorise l'adhésion des bactéries à l'urothélium et augmente ainsi le risque d'infection urinaire.
Tous ces facteurs accroissent le risque de formation de calculs.
En cas de crise de colique néphrétique chez une femme enceinte, l'examen radiologique de référence est l'échographie des voies urinaires. Les AINS sont strictement contre-indiqués au 3e semestre (risque de fermeture du canal artériel). Le traitement repose alors sur les antalgiques simples, les morphiniques si besoin et une bonne hydratation.
En cas de colique néphrétique compliquée, un drainage des urines sera effectué en urgence sous contrôle échographique. La sonde JJ est ensuite changée régulièrement, toutes les 6 semaines3, jusqu'à l'accouchement, à cause du risque de calcification de la sonde.
Le traitement curateur sera ensuite entrepris après la grossesse. Quoi qu'il en soit, la lithotripsie extracorporelle est formellement contre-indiquée chez la femme enceinte.
[3] Recommandations CLAFU 2010–2011. Prise en charge urologique des calculs rénaux et urétéraux de l'adulte
B - Bas appareil urinaire
Les calculs du bas appareil urinaire (vessie, urètre) sont plus rares.
Les calculs vésicaux sont le plus souvent le fait d’un obstacle sous-vésical (hypertrophie bénigne de prostate, sclérose du col), ou d’un corps étranger intravésical (fils, ballonnet de sonde vésicale).
Ils sont en général découverts devant des signes fonctionnels urinaires : hématurie, brûlures mictionnelles, pollakiurie.
En revanche, dans des populations bien ciblées, la lithiase du bas appareil urinaire est très fréquente. C’est principalement le cas des patients neurologiques avec une atteinte motrice sévère : tétraplégie, SEP évoluée… (cf. § VIII. Pour en savoir plus).
VI - Examens complémentaires
A - Biologiques
On distingue les examens biologiques réalisés dans le cadre de l’urgence – qui est en général celui de la colique néphrétique, afin de poser le diagnostic et d’affirmer le caractère simple ou compliqué de la crise –, de ceux réalisés pour la prise en charge et le suivi au long cours. Ces derniers, comprenant un bilan métabolique de base et l’analyse morphologique du calcul, ont pour but de retrouver l’étiologie de la maladie lithiasique et permettre ainsi un traitement optimal limitant les récidives.
1 - La bandelette urinaire (BU)
Dans la pathologie lithiasique, la bandelette urinaire réactive permet une détection rapide d’hématurie microscopique ou d’infection urinaire. Elle est réalisée de façon systématique par l’infirmière des urgences devant tout patient présentant une suspicion de colique néphrétique aiguë.
Elle est également intéressante dans la prise en charge au long cours pour la mesure du pH urinaire et donc le suivi des objectifs thérapeutiques. Sa faisabilité au lit du patient et son excellente valeur prédictive négative en font un examen de choix.
Pour l’hématurie, le taux de détection de la BU est de 150 μg d’hémoglobine/L correspondant à 5 000 érythrocytes/mL.
La détection de la leucocyturie se fait par le dosage de la leucocyte estérase produite par les polynucléaires neutrophiles. Ce test est assez sensible, permettant de détecter une leucocyturie > 104 leucocytes/mL. La détection des nitrites, témoin de la bactériurie, est basée sur la transformation des nitrates en nitrites par des bactéries présentant une nitrate réductase (entérobactéries). Le seuil déterminant est de 105 UFC/mL.
Une bandelette est considérée comme négative si on ne détecte ni leucocyturie ni nitrites. On peut alors exclure avec une excellente probabilité le diagnostic d’infection urinaire.
Une bandelette est considérée comme positive si on détecte une leucocyturie et/ou des nitrites. Cette positivité n’affirme en aucun cas le diagnostic d’infection urinaire mais doit être considérée comme ayant seulement une valeur d’orientation.
Le risque de faux-négatifs est très faible (3 %) mais possible pour le test des nitrites en cas de :
- bactériurie faible (dilution des urines, séjour des urines dans la vessie < 4 heures, compte de bactéries trop faible) ;
- régime restreint en nitrates, pH urinaire acide ou traitement diurétique ;
- infection causée par certaines bactéries non productives de nitrites comme les infections à streptocoques, entérocoques,Acinetobacter spp. ou S. saprophyticus.
Attention, en cas de CN fébrile, une BU peut être négative parce que les urines infectées sont justement « bloquées » par l'obstacle urétéral.
2 - L’ECBU
L’examen cytologique et bactériologique des urines est à réaliser en complément de la bandelette urinaire si celle-ci est positive.
Il est indispensable en cas de suspicion de pyélonéphrite obstructive et doit être réalisé avant toute antibiothérapie. Une mise en culture et un antibiogramme doivent être réalisés afin de pouvoir secondairement adapter l’antibiothérapie.
3 - Hémocultures
Elles doivent être réalisées de façon systématique et répétée dans le cadre d'une fièvre > 38,5 °C lors d'une pyélonéphrite obstructive. Elles permettent de détecter une éventuelle septicémie.
4 - Biologie standard
Le seul examen biologique réalisé systématiquement aux urgences dans le cadre d’une colique néphrétique aiguë non compliquée est le dosage de la créatinine4. Cependant, une NFS et un ionogramme sanguin sont très souvent réalisés.
[4] EAU (European Association of Urology). Guidelines on urolithiasis. 2011.
5 - Spectrophotométrie infrarouge
Elle peut être réalisée sur des calculs expulsés spontanément ou sur des fragments recueillis après traitement.
Elle permet de déterminer précisément la composition moléculaire et cristalline des calculs.
En fonction de la composition et de la structure du calcul, différentes causes peuvent être proposées.
6 - Bilan métabolique de première intention5
Ce bilan est actuellement systématiquement prescrit dès le premier épisode lithiasique.
Il comprend :
- un bilan sanguin : créatininémie, calcémie, glycémie à jeun, uricémie ;
- un bilan sur urines de 24 h : créatinine, volume total, calcium, sodium, urée, urates ;
- un bilan sur urines du matin (à jeun) : pH, densité, BU, cristallurie.
Les conditions de recueil des urines de 24 h doivent être précises.
Il est important que le patient ne modifie pas ses habitudes alimentaires pour la réalisation de ce bilan.
Il doit être réalisé à plus d’un mois d’un épisode aigu ou d’un geste urologique.
[5] Comité lithiase de l'Association française d'urologie (CLAFU). Recommandations pour le bilan métabolique et la prise en charge médicale de la lithiase. 2011.
B - Radiologiques
En urgence, les examens d'imagerie sont indiqués pour affirmer le diagnostic de colique néphrétique (dilatation de la voie excrétrice supérieure, calcul…), en évaluer la gravité (rein unique, urinome…), et préciser les chances d'expulsion spontanée du calcul (taille, localisation et morphologie).
Leur indication et le délai acceptable pour les obtenir sont dépendants de leur accessibilité et du contexte clinique (CN simple, CN compliquée, terrains particuliers, doute diagnostique…).
L'imagerie est également essentielle avant un traitement urologique invasif afin de préciser au mieux la morphologie des voies urinaires et les caractéristiques du calcul.
1 - ASP
Très facile à réaliser en urgence. Cependant de sensibilité et spécificité médiocres pour mettre en évidence un calcul (respectivement 40 à 58 % et 60 à 77 %).
L'ASP ne doit donc pas être fait isolément, mais couplé à un autre examen d'imagerie.
De plus, il ne renseigne que sur la présence d'un calcul mais pas sur les complications éventuelles.
On considère qu'un calcul est opaque à la radiographie lorsque l'on peut le décrire à l'ASP. On considère qu'un calcul est radio-transparent dès lors qu'il n'est visible qu'à l'échographie. Les calculs radio-transparents sont vus au scanner.
Quand le calcul est visualisé sur l'ASP, celui-ci peut être utilisé pour suivre la progression du calcul.
2 - Échographie réno-vésicale
Examen non invasif, peu coûteux et rapide, mais opérateur-dépendant. L'échographie des voies excrétrices urinaires est associée en combinaison avec l'ASP et peut être utilisée dans la prise en charge de la colique néphrétique aux urgences.
Elle détecte le mieux les calculs situés à la jonction pyélo-urétérale et urétéro-vésicale, surtout si elle est réalisée à vessie pleine. Le calcul apparaît hyperéchogène, avec un cône d'ombre postérieur.
Elle confirme le diagnostic clinique de CN en objectivant une dilatation des cavités pyélocalicielles et/ou de l'uretère (fig. 15.3). Cependant, toute dilatation ne signifie pas obstruction (hypotonie séquellaire d'un obstacle, distension vésicale lors de l'examen), et toute obstruction ne se traduit pas immédiatement par une dilatation qui peut apparaître quelques heures après (20 à 30 % des obstructions brutales sur calcul urétéral ne sont pas objectivées).
Elle décrit également le parenchyme rénal, un amincissement pouvant être expliqué par un obstacle chronique.
Fig. 15.3. Échographie rénale : dilatation des cavités pyélocalicielles droites lors d'une CN.
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3 - Scanner abdomino-pelvien sans injection de produit de contraste
Il s'agit d'un examen rapide, indépendant du patient et de l'opérateur, mais irradiant.
TOUS les calculs sont visibles au scanner, en dehors des calculs médicamenteux. Le scanner sans injection présente une très grande sensibilité (96 %) et spécificité (98 %) pour le diagnostic de lithiase urinaire et détecte des calculs millimétriques (fig. 15.4).
En plus de la visualisation directe du calcul, d'autres signes indirects peuvent aider au diagnostic : dilatation des cavités pyélocalicielles, infiltration de la graisse périrénale ou péri-urétérale, épaississement de la paroi urétérale en regard du calcul (rim sign)…
De plus, le scanner permet de mesurer la densité Hounsfield (UH) des calculs et ainsi d'orienter vers une composition particulière du calcul et de prédire l'efficacité de la LEC.
Fig. 15.4. CN sur calcul de l'uretère lombaire droit. Présence d'un calcul caliciel inférieur droit dans un calice dilaté.
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4 - Uroscanner
Il comprend des clichés sans injection puis avec injection de produit de contraste avec analyse au temps tardif dit excrétoire. Il permet donc de visualiser les voies urinaires excrétrices.
En cas de doute sur une réelle obstruction, l'analyse du retard d'excrétion permet souvent de trancher.
Il est nécessaire avant un geste urologique invasif pour le traitement de calculs (type NLPC) afin de connaître au mieux la morphologie des voies urinaires et les caractéristiques (taille, forme, topographie, densité du calcul).
Au final, dans le cadre de l'urgence, la colique néphrétique simple requiert le couple ASP/échographie réno-vésicale ou le scanner abdomino-pelvien sans injection de produit de contraste, en fonction du plateau technique de chaque hôpital.
La colique néphrétique compliquée impose la réalisation d'un scanner sans injection.
En cas de doute diagnostique, un scanner sans injection est réalisé, souvent complété par une injection de produit de contraste dans un 2e temps.
L'urographie intraveineuse (UIV) n'a plus sa place dans la pathologie lithiasique de nos jours.
VII - Prise en charge
Il est important de différencier la prise en charge en urgence correspondant à celle de la colique néphrétique et pouvant engager le pronostic vital si elle est compliquée, de la prise en charge au long cours, nécessitant un bilan plus complet.
A - En urgence
La prise en charge en urgence est principalement celle de la colique néphrétique et vise à soulager le patient quand elle est simple, et à dériver les urines en urgence lorsqu'elle est compliquée.
1 - Colique néphrétique aiguë simple
Elle fait l’objet de recommandations, actualisées en 20086.
Son traitement est ambulatoire.
Le traitement est médical et l’objectif est de traiter la douleur.
Il est guidé par la réalisation répétée d’une mesure de l’intensité douloureuse par l’EVA.
[6] Recommandations de la 8e Conférence de consensus de la Société francophone d'urgences médicales. Prise en charge des coliques néphrétiques de l'adulte dans les services d'accueil des urgences. Actualisation 2008.
a - Anti-inflammatoires stéroïdiens
Deux mécanismes d’action :
- ils bloquent les cyclo-oxygénases impliquées dans la cascade inflammatoire, ils diminuent l’œdème local et l’inflammation et entraînent une relaxation des fibres musculaires lisses de l’uretère diminuant ainsi le péristaltisme ;
- ils diminuent le débit de filtration glomérulaire.
Le kétoprofène (Profénid®) 100 mg IV sur 20 min 3 ×/j est reconnu comme le plus efficace et possède l’AMM dans le traitement de la colique néphrétique aiguë depuis 2001.
b - Antalgiques
- Niveau 1 (paracétamol) : en association aux AINS en cas de douleurs de faible intensité.
- Niveau 3 (morphiniques) :
- en cas de contre-indication aux AINS ;
- en association aux AINS en cas de douleur d’emblée importante ;
- en cas de résistance au traitement par AINS ;
- à utiliser sous forme de titration IV de chlorhydrate de morphine ;
- Antispasmodiques (phloroglucinol) : pas de recommandation particulière.
c - Restriction hydrique ou l’hyperhydratation
Aucune étude n’a permis de montrer la supériorité d’une des attitudes par rapport à l’autre. Les boissons sont laissées libres en fonction de la soif du patient.
Le bon sens recommande cependant la restriction hydrique en cours de phase douloureuse.
d - Tamisage des urines
Permet d’envoyer le(s) calcul(s) expulsé(s) en analyse spectrophotométrique.
2 - Colique néphrétique aiguë compliquée
Sa prise en charge fait également l’objet de recommandations.
Elle nécessite une hospitalisation en urologie, une mise en condition avec pose de voie veineuse périphérique et rééquilibration hydroélectrolytique. Une prise en charge réanimatoire peut être nécessaire. Le bilan préopératoire et la consultation d’anesthésie en urgence ne doivent pas être oubliés.
Le traitement est alors chirurgical et consiste à drainer les urines du haut appareil urinaire.
Le drainage des urines est dans la majorité des cas assuré par une sonde urétérale, qui peut être interne (alors appelée sonde JJ) (fig. 15.5) ou externe (fig. 15.6), montée sous contrôle fluoroscopique et par voie endoscopique. En cas de sonde JJ, la boucle supérieure trouve sa place au niveau du pyélon et la boucle inférieure dans la vessie. La sonde urétérale externe est souvent préférée à la sonde JJ en cas d’urines pyéliques purulentes. Dans ce cas, la conversion en sonde JJ est en général réalisée après 48 h d’apyrexie.
Fig. 15.5. ASP de face, sonde JJ gauche en place.
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Fig. 15.6. ASP de face, sonde urétérale gauche en place.
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En cas d'échec de drainage des urines par les voies naturelles, une néphrostomie percutanée est réalisée sous contrôle échographique. Sa pose nécessite des cavités pyélocalicielles dilatées. À noter que certaines équipes proposent d'emblée la pose de néphrostomie comme moyen de dériver les urines du haut appareil urinaire.
Dans tous les cas, un prélèvement des urines pyéliques doit être réalisé en peropératoire pour analyse bactériologique.
En cas de pyélonéphrite obstructive, une antibiothérapie parentérale doit être mise en place le plus rapidement possible dès les prélèvements bactériologiques effectués :
- double ;
- associant une C3G avec un aminoside (ceftriaxone [Rocéphine®] 1 à 2 g/24 h IVL en une prise + gentamycine [Gentamicine®] 3 mg/kg/24 h IVL en une prise) ;
- secondairement adaptée à l’antibiogramme ;
- relais per os peut être envisagé à 48 h d’apyrexie ;
- durée totale de 10 à 21 jours7.
[7] AFFSAPS. Recommandations de bonne pratique dans le diagnostic et l'antibiothérapie des infections urinaires bactériennes communautaires chez l'adulte. Juin 2008.
B - À long terme
L’expulsion du calcul peut être spontanée. On estime qu’un calcul de 4 mm de l’uretère pelvien a 90 % de chance d’être expulsé spontanément. Au contraire, les calculs de plus de 8 mm ont des chances quasi nulles d’être évacués naturellement.
La prise en charge au long cours est médico-chirurgicale, afin de traiter le calcul mais également d’éviter les récidives.
1 - Traitement médical
Il repose principalement sur des règles hygiéno-diététiques. En cas de progression de la maladie lithiasique malgré ces mesures, un traitement médicamenteux peut être proposé.
Dans tous les cas, une surveillance régulière est nécessaire.
a - Indications d’une prise en charge spécialisée
- Maladie lithiasique active avec bilan de première intention négatif.
- Néphrocalcinose ou insuffisance rénale.
- Découverte d’un diabète ou d’un syndrome métabolique méconnu.
- Hypercalcémie.
- Ostéoporose ou fractures pathologiques.
- Persistance d’une hypercalciurie sous régime sodé < 8 g/j.
b - Mesures diététiques générales
Elles sont applicables à tous les patients atteints de maladie lithiasique urinaire :
- diurèse > 2 000 mL = premier objectif à atteindre et à maintenir au long cours : évaluée sur le volume des urines de 24 h ou sur les urines du réveil avec mesure de la densité (objectif < 1 015) ;
- boissons à répartir tout au long de la journée ;
- alimentation équilibrée/réajustement alimentaire :
- normalisée en calcium (800 mg à 1 g/j), en sel (< 9 g/j), et en protéines animales (< 1,2 g/kg/j),
- limiter les prises excessives d’aliments riches en oxalates (chocolat, fruits secs, épinards, oseille, rhubarbe, thé),
- limiter les boissons sucrées et sodas (fructose).
c - Mesures diététiques particulières
Elles sont à adapter en fonction de l’étiologie des calculs :
- calculs uriques : alcalinisation des urines (eau de Vichy). Objectif = pH 6,5–7, régime pauvre en fructose et en purines ;
- calculs phospho-ammoniaco-magnésien (PAM) : suppression des boissons alcalines, acidifications des urines (acide phosphorique) ;
- calculs de cystine : alcalinisation des urines (le pH urinaire doit être > 7,5), boissons abondantes (diurèse > 3 L/j).
d - Traitements médicamenteux
Ils sont réservés à des cas très particuliers :
- antibiothérapie adaptée en cas de calcul PAM ;
- diurétique thiazidique en cas d’hypercalciurie persistante ;
- allopurinol en cas d’hyperuricémie.
e - Surveillance
Elle est essentielle.
Une surveillance semestrielle est recommandée la première année puis annuelle, avec un bilan urinaire.
2 - Traitement chirurgical
Il dépend de la morphologie et des comorbidités du patient, de la localisation du calcul, mais aussi de sa taille, de sa composition et de l’anatomie des voies urinaires.
La prise en charge urologique des calculs rénaux et urétéraux a fait l’objet de recommandations du Comité lithiase de l’AFU en 2010–20118.
[8] Chabannes É, Bensalah K, Carpentier X, Bringer JP, Conort P, Denis É et al. ; Le comité lithiase de l'AFU. [Management of adult's renal and ureteral stones. Update of the Lithiasis Committee of the French Association of Urology (CLAFU). General considerations]. Prog Urol 2013 ; 23(16) : 1389-1399
a - Lithotritie extracorporelle (LEC)
Il s’agit d’une méthode non invasive.
- Principe : un générateur extra-corporel produit des ondes acoustiques. Celles-ci sont focalisées sur le calcul par un système de repérage radiologique afin de le pulvériser.
- Technique : réalisée en ambulatoire, sous simple sédation. Un ECBU doit être réalisé quelques jours avant ainsi qu’un ASP la veille pour vérifier que le calcul est toujours en place.
- Indications : en première intention pour le traitement des calculs du rein < 20 mm. Calculs radio-opaques (ils doivent être visibles à l’ASP), de densité < 1 000 UH. Traitement de référence chez l’enfant.
- Contre-indications :
- grossesse ;
- infection urinaire non traitée ;
- obstacle en aval du calcul ;
- anévrisme de l’artère rénale ou de l’aorte ;
- troubles de la coagulation non corrigés.
- Résultats : but = SF (sans fragment résiduel), obtenu dans 30 à 76 % des cas.
- Complications :
- CN post-LEC par migration des fragments résiduels (20 %) ;
- hématurie ;
- infections urinaires.
b - Urétéroscopie (rigide et souple)
- Principe : introduction par les voies naturelles de façon rétrograde d’un urétéroscope permettant de visualiser et de travailler au contact du calcul (fig. 15.7). Extraction du calcul à la pince ± fragmentation au laser. Risque de lésions urétérales (perforation, stripping).
- Indications :
- calculs résistants à la LEC (densité > 1 000 UH), ou contre-indication de la LEC ;
- en concurrence avec la LEC pour les calculs rénaux < 2 cm ;
- calculs de l’uretère pelvien.
- Résultats : SF dans 95 % des cas pour les calculs de l’uretère pelvien, 80 % pour les calculs rénaux < 1 cm et 72 % pour ceux entre 1 et 2 cm.
- Complications :
- hématurie ;
- douleur de colique néphrétique par caillotage urétéral ;
- infection urinaire.
Fig. 15.7. Vue peropératoire d’une urétéroscopie souple avec une lithiase.
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c - Néphrolithotomie percutanée (NLPC)
- Principe : ponction percutanée du rein sous contrôle échographique et fluoroscopique (rayons X) (patient en décubitus ventral ou latéral), puis dilatation progressive du trajet obtenu permettant la mise en place d’une gaine d’accès et l’introduction d’un néphroscope. Puis visualisation, fragmentation et extraction des calculs (fig. 15.8).
- Indications : traitement de référence pour les calculs > 2 cm, coralliformes ou complexes du rein.
- Risques :
- complications hémorragiques et infectieuses ;
- lésions d’organe intra-abdominaux (côlon…).
- Résultats : SF dans 80 à 85 % des cas, possibilité de faire une LEC ou une URSS sur les fragments résiduels.
Fig. 15.8. Vue peropératoire d’une NLPC. Pince à calcul et sonde urétérale en place.
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d - Chirurgie à ciel ouvert
- Peu d’indication aujourd’hui (1 % des traitements pour les calculs rénaux).
- Néphrectomie polaire ou totale pour les calculs avec parenchyme détruit en regard.
- En association à des anomalies anatomiques, traitement conjoint (ex : cure de syndrome de jonction pyélo-urétérale et pyélotomie pour calcul pyélique).
e - Traitement des calculs de vessie
- Fragmentation lors d’une cystoscopie (pince à calcul, air comprimé).
- Chirurgie conventionnelle (taille vésicale) si taille du calcul trop importante.